Selon un article paru dans les colonnes du
Miami Herald, qui reprend un sondage
récemment effectué par un professeur de
l'Université internationale de la Floride, l'ex-
Premier ministre Laurent Lamothe et
l'actuelle première dame Sophia Martelly
arrivent en tête des intentions de vote.
En dépit de toutes les protestations et les
exigences antigouvernementales réclamant sa
démission de ses fonctions, le président haïtien
Michel Martelly reste populaire, selon un
nouveau sondage d'opinion publique.
Michel Martelly, qui entamera la dernière année
de son quinquennat en mai, a obtenu 57%
d’intention favorable. Mais la question, à savoir
si sa popularité conférera la victoire au candidat
à la présidence qu’il choisira de soutenir, reste
en suspens. Martelly ne peut pas se
représenter, et les Haïtiens attendent de voir
quel candidat obtiendra son soutien.
Plus de la moitié des Haïtiens croient que le
pays va dans la mauvaise direction, tandis que
près de 70% ne croient pas que les choses vont
bien aujourd'hui.
Martelly « a le soutien du peuple », a déclaré
Eduardo Gamarra, professeur de relations
internationales à l'Université internationale de
Floride qui a conduit l'enquête. « On le voit
dans sa cote de popularité […], mais c’est là que
cela se termine. Même avec les 57% qui disent
appuyer Martelly, cela ne suffit pas à cause de
tout ce qu’il y a dans le sondage. »
La majorité des personnes interrogées, soit 80%,
ont dit qu'ils étaient au chômage et énumèrent
le coût élevé de la vie, le chômage et la faim
comme les principaux problèmes auxquels est
confronté le pays.
Ce sondage a débuté le 13 mars et s’est terminé
la semaine dernière. Gamarra a déclaré que les
1 003 sondés ont été choisis au hasard à partir
d'une base de données de téléphone. La marge
d'erreur est d'environ 5%.
Selon Gamarra, le sondage aurait été financé
par «les membres du secteur privé». Ils
voulaient avoir une idée de la façon dont le
public se sent au moment où Haïti se prépare à
tenir enfin des élections locales et législatives
tant attendues, et l'élection présidentielle, dit-il.
Les élections législatives sont fixées au 9 août.
Le deuxième tour des législatives et des
élections locales est prévu pour le 25 octobre en
même temps que le scrutin pour l'élection
présidentielle. Si personne ne gagne la
présidentielle dès le premier tour, un second
aura lieu le 27 décembre.
Alors qu'il a fait des consultations pour le
compte de l'ancien Premier ministre haïtien
Laurent Lamothe, évincé en décembre dernier
au milieu d'une crise politique, Gamarra révèle
que le sondage n’est pas le travail du
gouvernement. Mais les résultats, a-t-il dit, sont
assez conformes à ce qu'il a vu dans quatre
autres sondages nationaux qu'il a menés en
Haïti.
Comme ces précédentes enquêtes, le sondage
actuel est rempli de contradictions. L’éducation
ne fait pas partie des deux priorités des
répondants, par exemple, mais leur opinion
favorable à l’égard de Martelly repose sur son
initiative d'éducation gratuite.
L'opposition, à l’origine de 803 manifestations
l'an dernier à travers le pays pour réclamer la
démission de Martelly, accusant son
administration de gaspillage, de corruption et de
traîner les pieds sur l’organisation des élections,
n’a pas été interrogée dans le cadre de ce
sondage.
André Michel, avocat et un des leaders de
l'opposition, a refusé de commenter le sondage.
Jean-Junior Joseph, un blogueur et ancien porte-
parole politique du Premier ministre intérimaire
Gérard Latortue, a dit qu'il n’accorde pas foi à
ce sondage. À l’instar d'autres personnes en
Haïti, il s’interroge sur ce qui est vraiment
derrière cette enquête.
«L'économie est invalidante, la corruption est au
plus haut point et le gouvernement est proche
de la faillite », a-t-il dit. « Maintenant, réaliser
un sondage, c'est jouer avec notre esprit, nous
faisant croire que les choses sont excellentes. »
Au cours des dernières semaines, l'opposition a
mis en veilleuse ses protestations et, à la place,
a rejoint d'autres partis en train de se préparer
pour participer aux prochaines élections.
Plusieurs partis de l'opposition, par exemple,
ont annoncé leur propre élection primaire pour
décider qui, parmi leurs membres, devrait être
le candidat à la présidentielle. Même l'ancien
président René Préval a fait son retour sur
l’échiquier politique en créant une nouvelle
plateforme politique appelée Vérité, qui
s’apprête à présenter des candidats. Elle est
parmi les 166 partis politiques et plateformes
agréés par le Conseil électoral provisoire pour
participer aux élections.
Toutefois, même si les partis politiques ont été
admis et que l'enregistrement des candidats
pour les législatives s'ouvriront ce lundi, les
Haïtiens sont assez pessimistes. Selon le
sondage, 61% des Haïtiens ont dit qu'ils ne
croient pas que les élections auront lieu.
Le sondage montre également que rien n’est
encore joué pour les élections à un point tel que
«n’importe qui peut gagner », a déclaré
Gamarra.
Par exemple, lorsqu'on leur a demandé qui ils
soutiendraient, 21% ont dit qu'ils voteraient
pour Lamothe. L'épouse de Martelly, Sophia, a
reçu 14% des intentions de vote. Mais 31% ne
savaient pas ou n’avaient pas de réponse.
Près de 80% des sondés ont déclaré ne pas
savoir qui serait le candidat le plus important si
l'élections présidentielle devait avoir lieu
aujourd'hui.
«En Haïti, quelqu'un peut venir à la dernière
minute et devenir aussi important que Michel
[Martelly], a déclaré Gamarra. Le sondage
reflète l'incertitude absolue que vit Haïti en ce
moment. »
Un article de JACQUELINE CHARLES paru dans le
Miami Herald et traduit par Patrick SAINT-PRE